Et voici que moi, Tournesol, en compagnie de mes célèbres acolytes, j’ai repris du service avec mon fameux pendule à la recherche de pépites ludiques dans les dédales des allées du FIJ.
Il a fallu se repérer un peu avec les changements de cette année mais pas non plus de quoi trop me déboussoler. Je suis arrivé sans trop d’attentes particulières.
Il faut dire que j’ai rapidement vécu les conséquences d’un changement majeur dans ma carrière de joueur : cela fait un peu plus d’un an que j’ai intégré un club de jeux tout près de chez moi. Or, de nombreux joueurs apportent régulièrement des nouveautés tout au long de l’année ce qui permet d’en tester ou au moins d’en apercevoir une certaine quantité.
Et forcément cela se ressent sur un festival tel que le FIJ qui propose la présentation de jeux déjà sortis et de parutions à venir.
Cela a le double effet de ne pas avoir à tester ce que je connaissais déjà, mais de réduire aussi l’effet « découverte ». Cela-dit, un festival d’une telle taille ne peut que réserver de nombreuses surprises !
On a retrouvé tous nos rituels d’équipe : premières parties dans le train (Mindbug, je l’adore !), prise de température de la ville (très beau soleil sur la plage pour nous accueillir), installation dans la location, et surtout, soirée d’ouverture au Hive, ce lieu que je voudrais tellement voir délocalisé à Lyon !
Cette année, nous n’avions pas accès au FIJ le jeudi matin (on croise les doigts pour retrouver cela l’année prochaine !), ce qui nous a permis d’être presque les premiers dans la file d’attente en milieu de journée. Et c’est parti pour le lâcher de joueurs !
Petits mais nombreux
Cela nous est rapidement apparu : on est sur une grosse grosse tendance de petits jeux, souvent de cartes, avec également une place de plus en plus grande au niveau des titres pour deux joueurs. Personnellement, je trouverai presque nécessaire d’en faire une catégorie à part entière dans les remises de prix. Effectivement, à mon sens l’expérience de jeu de société à deux reste singulière (ne dit on d’ailleurs pas parfois qu’il faut au moins être 3 pour faire un groupe ?) Et je peux trouver dommage que des jeux à deux restent sur la touche si l’on veut privilégier de mettre en valeur des jeux à effectifs plus larges, ce que je trouve quelque part logique. Il y a certes eu des exceptions, d’autant que cette année, un jeu solo était nommé, et un jeu exclusivement 4 joueurs a carrément gagné donc oui, quand le jeu est bon, cela transcende tout. Le débat reste ouvert !
Dracula Vs Van Helsing
Et bien c’est justement l’un de ces petits jeux à deux que je m’en vais vous présenter. Testé avec DuponD, il fait directement suite à Jekill VS Hyde, du même éditeur, sortie précédemment, avec notamment une reprise d’une même mécanique : celle de pouvoir intervertir la couleur d’atout dans un jeu pli. Ici, il s’agit d’incarner soit Dracula qui tente de vampiriser les citoyens de 5 quartiers de la ville soit Van Helsing qui tente de faire déjouer ses plans. Chaque joueur reçoit 5 cartes (sous la forme de tuiles) composées d’un chiffre et d’une couleur, qu’ils doivent disposer sur leur petites réglettes dans l’ordre où ils les ont reçu et visibles uniquement pour soi. Chacun son tour les joueurs pourront piocher, et remplacer certaines de leur cartes avec des effets de jeux très bien pensés. Lorsque la manche prend fin, Dracula et Van Helsing s’affrontent sur chacun des quartiers à l’aide de leurs cartes positionnées devant eux. Le but étant de s’être composé le meilleur jeu, deviner celui de l’autre, et faire achever la manche lorsqu’on pense avoir pris l’avantage.
J’ai beaucoup apprécié ce jeu très rythmé, comportant un petit plateau de jeu central représentant la ville, et le système de carte à effets. Le twist de pouvoir intervertir la couleur d’atout me semble encore mieux exploité que dans Jekill VS Hyde qui m’avait paru un brin chaotique.
Solstis
Avouons-le, il n’est pas totalement certain que j’aurais testé ce jeu si notre samouraï légendaire, Bruno Cathala, accompagné de son binôme Corentin Lebrat (qui sera primé le soir même pour Faraway), n’étaient pas en train de faire une cession de dédicace à l’occasion de la future sortie de ce bien nommé Solstis.
N’empêche que le travail d’illustration sur ce tout petit jeu très modeste a aussi largement contribuer à magnétiser mon pendule.
Sur Solstis, les deux joueurs vont piocher alternativement des petites tuiles (chacune n’étant présente qu’en un seul exemplaire) qui composent à elles tout un paysage de montagne sur laquelle des torches sont allumées au niveau de la ligne d’horizon.
L’objectif pour chaque joueur est de composer un chemin continu avec le plus de tuiles possibles, à partir d’au moins une tuile du bas de la montagne, jusqu’à au moins l’une des torches. Au fur et à mesure de la partie, vous voyez en même temps votre adversaire constituer son propre chemin de son côté, vous laissant saluer toutes les tuiles auxquelles vous n’aurez donc plus accès !
Des bonus sont à la clé lorsque vous complétez des carrés de tuiles adjacentes ce qui peut faire réaliser des combos de points non négligeables. Une partie est rapide, et on éprouve un vrai sentiment de satisfaction à la fin de celle-ci, avec en même temps un esprit de course à la tuile, mais dans une ambiance on ne peut plus zen. Une petite boite au format de poche que j’aurais très plaisir à balader ici ou là, puisque bien évidemment, je me suis fait dédicacer ma version !
Huis Clos
Avant de partir en plus haute mer, je vous propose un petit aperçu d’un jeu là encore relativement modeste mais avec sa petite originalité qui m’a fort séduit. Huis clos est un jeu d’enquêtes composé telle une série policière qui vous fera successivement enquêter sur 10 crimes dans un même univers d’une famille aristocratique londonienne. Ainsi, vous retrouverez de meurtres en assassinats (oui c’est moins zen que Solstis niveau ambiance), les mêmes personnages (qui ne sont pas en prison ou tués), et vous suivrez le fil de leurs histoires. Le système est très astucieux et permet des parties rapides, notamment pour des joueurs parfois réfractaires à démarrer un jeu d’enquête pour plusieurs heures. A chaque fois, un mort et 7 témoins avec leur fiche d’identité et leur témoignage que vous devrez recouper pour découvrir les classiques : qui, pourquoi et comment. On a vraiment envie d’enchainer plusieurs enquêtes et on se surprend à s’attacher à la trame narrative et aux personnages. Il faut dire que le travail d’écriture facilite grandement les choses : c’est ni trop niais, ni trop alambiqué, ce qui n’est pas forcément gagné dans les jeux d’enquêtes. Tout cela tient dans une toute petite boite qui pourrait aisément vous faire passer à côté. Le système de rangement est là encore très bien pensé et participe à la narration.
Les 7 mers
Bon, je vous ai promis la mer, et bien en voilà 7, destination plein large avec ce jeux de pirates (attention thématique que j’adore !) qui participent à un festival de piraterie dans lequel ça sera à celui qui naviguera, s’équipera, combattra, et bien sur, pillera le mieux.
Le plateau est composé d’une tuile centrale entourée des fameuses 7 mers qui se distinguent par leur niveau de trésor ou d’embuche que vous allez y croisé. Chacune a donc son petit paquet de cartes face cachée dans lequel vous irez pioché. Le jeu vous pousse à explorer un maximum de mers différentes. Pour cela, vous pourrez améliorer votre navire à l’aide de votre plateau personnel.
J’ai trouvé ce combiné mécanique-matériel vraiment bien pensé et original. Je dirai qu’il se situe dans une gamme initié plus. Les auteurs nous ont évoqués de nombreux modes de jeu, grimpant en profondeur au fur et à mesure.
Ce jeu sortira au cours de l’année après sa campagne de financement participatif.
Saline
Revenons sur les côtes mais dans un univers encore pleinement marin (vous avez vu ce travail sur les transitions !), avec Saline, un jeu ni présenté sur le FIJ et même sorti en 2021. Mais alors qu’est-ce que donc vient-il faire dans cette review ? Et bien, sur un festoche, il arrive parfois de flasher sur un jeu négligemment posé dans une vitrine d’un éditeur encore inconnu de mon pendule (Chèvre éditions, ça ne s’invente pas), et qu’à la simple illustration et au pitch du frère du créateur, et bien vous avez le sel à la bouche.
Créer par des gars de Saint Nazaire, en partenariat avec les centres culturels et historiques de la région, le jeu vous propose d’incarner un paludier du 18ème siècle tentant de faire fructifier ses salines.
Tout dans cette proposition fait frétiller mon pendule : un jeu dont le point de départ de la création est un univers très travaillé et magnifiquement retranscrit, une connexion direct à l’histoire, un travail d’illustration splendide venant valoriser la thématique et enfin des mécaniques cohérentes et astucieuses. Il y a toujours un piège dans ces cas-là, que le jeu ne soit pas à la hauteur des ambitions thématiques, et bien là on ressent cet équilibre chez un auteur aussi amoureux de sa région que des jeux.
Je vous ferai de plus amples retours avec quelques parties mais je ne pouvais que céder devant une si belle proposition. Et ainsi, les termes mulon, oeillets, liard et autres jargons salins de l’époque, n’auront plus de secrets pour vous !
Justement, et si on suivait les péripéties des jeux et auteurs
Si vous nous suivez sur ces dernières années, vous savez que nous suivons des jeux et auteurs qui nous ont particulièrement tapés dans l’oeil. Et bien voici de leur nouvelles.
Thomas Planète : le créateur du fabuleux « Turbulences » n’a pu tenir un stand cette année sur le Fij pour des raisons indépendantes de sa volonté mais nous avons tout de même pu le croiser et prendre des nouvelles de ses aventures. Thomas reste à l’affut de proposition qui permettrait de voir un jour son jeu sortir en boutique mais l’équilibre prix/respect de la proposition initiale n’est pas si facile à trouver ! Sachez que vous pouvez toujours vous le procurez directement auprès de son site « ludenbois ».
« Toutes voiles dehors », son prochain jeu en développement, a acquis à présent sa mécanique définitive et vise une sortie prochainement.
« This way », l’éditeur et créateur de « Ice » était présent sur le FIJ et nous avons pu d’ailleurs réserver un créneau pour enfin expérimenter cette proposition qui m’avait tellement tapée dans l’oeil avec ce plateau aux cinq couches dans lequel des explorateurs creusent la glace à la recherche d’artefacts. Il faut reconnaitre une nette déception sur l’expérience de jeu du fait d’aléas sur le stand, ce qui ne nous a pas vraiment permis d’avoir suffisamment de temps pour en exploiter…. la profondeur. Les auteurs ont davantage mis l’accent sur la future sortie de la 2ème version du jeu qui sera calibrée pour sortir en boutique après sa campagne sur Gamefound en mai de cette année. La perte de deux couches sur le plateau sera compensée par une mécanique plus dynamique et approfondie. A suivre donc…
Enfin, j’ai pu prendre aussi des nouvelles de l’avancement du projet « Transperceneige » par Rosenoire éditions. Le retard sur la livraison du jeu, initialement prévue sur le premier semestre 2024, est expliqué par une volonté de prendre davantage de temps pour affiner la mécanique de jeu, ainsi que par des moyens humains et financiers limités dans cette jeune boite d’édition. Nous avons pu d’ailleurs découvrir qu’il était possible de faire appel à une entreprise externe qui peut se charger d’étudier et de repenser l’équilibre d’un jeu. Etape que nous savons particulièrement ardue et potentiellement fastidieuse de la conception d’un jeu. Nous attendons donc avec impatience la date définitive de livraison, possiblement pour la fin d’année.
Donjon, de la BD au jeu
C’est une nouvelle fois par le visuel que je me suis fait attrapé sur le stand de Sylex, pour « Donjon », un jeu tiré d’une BD que je ne connaissais pas. Dans une catégorie « initié » mais très grand public, Donjon propose d’inverser la thématique du preu chevalier qui va défier des bestioles dans des habitats sombres et lugubres, en proposant aux joueurs d’incarner plutôt le maitre du donjon qui doit manager ses bestioles pour éjecter les chevaliers qui s’y risqueraient.
On est dans de la pure gestion des salles du Donjon, qui ont chacune des effets à activer pour mieux répartir les bestioles des différentes couleurs. Chaque joueurs gère son propre Donjon et va scorer selon des objectifs communs à tous qui décrivent des conditions de placement.
La mécanique fût sympathique et nous avons passé un bon moment. Il m’a manqué personnellement un poil plus de complexité et d’interaction.
Bounty Hunters
On ne pouvait pas manquer l’affiche monumentale annonçant la présence du jeu sur le FIJ. « Encore un jeu Star Wars », se diront certains mais personnellement, je suis assez fan et là encore la DA me motivait.
Il s’agit d’un petit jeu relativement court et facile à apprendre. Basé sur du draft permanent, chacun va recruter des chasseurs de prime pour éliminer des personnages connus « et gentils » de l’univers Star Wars. Pour chaque personnage à éliminer vous devez recruter autant de chasseurs que les conditions requises. Vous aurez en même temps à piocher vos propres objectifs de scoring pour les faire correspondre à vos cibles et mais aussi obtenir des aides droïdes.
Comme dirait l’autre, ça casse pas trois pattes à un Jedi, mais ça peut faire le taf pour des début ou fin de soirées jeux. Le draft dynamise comme toujours très bien les choses mais avec toujours cet inconvénient d’être le nez rivé à son propre jeu.
Tournoi Mind bug
Avant de finir cette revue de jeux découverts sur le FIJ, je ne pouvais pas ne pas vous relater ma petite expérience autour d’un mini-tournoi Mindbug.
J’ai appris au cours du festoche que des tournois étaient organisés. Mindbug étant l’une de mes révélations sur ces dernières années, je ne pouvais donc que foncer. Mais c’était un peu tard donc je me suis retrouvé sur une édition à 4 joueurs seulement. J’ai donc attendu à l’heure prévue les trois autres participants. Etant donné que le tournoi avait lieu avec les deux nouvelles boites « Evolution suprême » et « Eternité suprême » j’ai tenté très rapidement d’en étudier les ajouts. Mais soudainement, trois individus déboulent à la table : trois enfants. Genre deux entre 8 et 11 ans et le dernier qui ne devait pas avoir plus de 14 ans. Deux frères et une soeur.
Je me dis bon, chelou mais cool aussi. Et là, je commence déjà à les entendre parler stratégie. Clairement ils connaissaient leur affaire. Petite méfiance donc.
Bilan final : comment vous dire… Se faire rouler dessus est une expression qui correspond assez bien à la situation. Je n’ai pas vu les trains passer. Et j’ai pu constater les combos dévastateurs de ces nouvelles éditions au point que sur deux des trois parties je me suis retrouvé totalement coincé.
Ce fût tout de même très fun, comme toujours avec cette pépite de jeu que je ne saurais trop vous conseiller, et j’ai tout de même pu repartir avec un paquet de cartes promotionnelles inédites (et tellement cheetées !!).
Reigns
J’ai gardé une petite bêtise pour la fin. Cela m’a fait marré de retrouver sous forme « jeu de société » un mini jeu qui existe en version smartphone. Reigns est un jeu très fun qui, en proposant de swiper comme sur Tinder, vous invite en tant que souverain de votre royaume, à faire constamment des choix quant à des lois ou décisions qui vous sont proposées par vos conseillers. Chacune de ces décisions aura des conséquences sur les quatre piliers de la société : l’armée, le peuple, les finances et l’église. Le but est de maintenir les curseurs à l’équilibre le plus longtemps possible. C’est infini et vous devez faire le score le plus gros. D’un jeu solo en version numérique, ils l’ont rendu multijoueur et compétitif sous sa forme plateau. Ceux qui n’incarnent pas le roi sont des conseillers qui ont des lois à proposer à leur souverain mais ont évidemment leur propre intérêt au niveau des quatre piliers. Au roi de sentir si le conseiller est en train de le piéger ou de l’aider en choisissant la bonne loi et en écartant celles qui le mèneront à sa perte.
Un jeu qu’on classera plutôt en jeu d’ambiance. Il risque de vite se faire sentir répétitif en revanche mais j’ai tout de même passé un très bon moment à tenter d’être le plus fin possible pour deviner les intentions des uns et des autres.
Et voilà, mon pendule s’en arrête là pour cette édition 2024 encore bien agréable. Vous l’aurez compris, pas de gros coups de coeur pour cette fois-ci, mais un approfondissement de la connaissance du monde du jeu, et surtout beaucoup de plaisir à travers cette passion et les moments entre amis.
Tournesol