De retour du Festival du Jeu à Cannes session 2022 avec
un jeu de rôle !
Bonjour à toutes et tous !
Aujourd’hui je vais vous parler du portage de la licence de jeu vidéo Dishonored en jeu de rôles papier.
Avant d’aller plus loin je vais revenir sur ce qu’est Dishonored. Si lecteur, tu sais de quoi il s’agit tu peux directement passer au paragraphe « tout le monde est à niveau ? Okay on peut commencer ! »
DISHONORED C’EST QUOI ?
Dishonored est une licence de jeu vidéo développée par Arkane Studio et éditée par Bethesda Softworks, la série connaîtra un premier jeu en 2012 (accompagné de deux DLC en 2012 et 2013) et un second volet (avec un dlc) en 2017.
Ok, c’est très bien tout ça mais ça ne me dit pas ce qu’est Dishonored. J’y viens. Dishonored est un jeu à la première personne dans un univers fictif type steam punk, ère industrielle dans une sorte d’empire britannique sombre, où les complots, la maladie sévissent dans un monde corrompu (ça vend pas du rêve présenté comme ça). Le jeu est une simulation immersive (ou immersive sim) ce qui signifie que vos choix de dialogues et d’actions auront un impact sur le déroulement du jeu et notamment la fin. Ainsi, il est possible de faire les jeux sans tuer personne, ni être vu par aucun ennemi ou, au contraire, flinguer tout le monde (ou de les passer par le fil de l’épée si vous êtes raffiné) pour ouvrir la voie dans un torrent de sang.
Le jeu s’intitule dishonored (Déshonnoré) car dans le premier volet vous incarnez le protecteur royal Corvo Attano qui assiste impuissant à la mort de l’impératrice (je n’ai d’ailleurs toujours pas compris du coup pourquoi protecteur royal plutôt qu’impérial). On vous met ce meurtre sur le dos et c’est à vous de laver votre honneur et défendre la descente de l’empire.
Dans le second opus, vous aurez la possibilité de jouer encore une fois Corvo ou la nouvelle impératrice. Il vous faudra à nouveau déjouer une tentative de coup d’état toujours en lien avec la famille impériale.
Dans les DLC vous jouerez encore des personnages différents vous permettant de porter un autre point de vue sur les intrigues principales et de creuser les mystères du monde car, ce que je ne vous ai pas encore dit, c’est qu’en plus d’une technologie avant-gardiste qui caractérise l’univers de dishonored il existe une sombre magie ! Nous y reviendrons dans la partie jeu de rôles pour voir comment celui-ci s’est approprié les mécaniques du jeu. Sans m’étendre sur le sujet il faut que vous sachiez qu’il existe dans Dishonored une sorte de monde onirique inachevé parallèle au nôtre, qui se nomme « le grand vide ». Dans ce vide une entité pluri millénaire semble faire la loi, il s’agit de l’Outsider à l’apparence juvénile. A chaque génération l’outsider impose sa marque à 8 individus (plus ou moins) simplement pour voir ce qu’ils feront d’un fragment de ses pouvoirs. Lorsqu’une personne porteuse de la marque décède l’Outsider marque un autre individu.
L’énergie du grand vide peut aussi se manifester à travers des runes inscrites sur des os de baleine c’est ce qu’on appelle les charmes d’os et n’importe qui peut bénéficier de leur pouvoir.
Dans le jeu vidéo vous aurez la possibilité d’accepter ou non l’offre de l’outsider.
Les deux jeux se déroulent lors d’épidémies (une peste transmise par des rats et une invasion de mouche de sang) dans ce contexte morose, l’univers est pesant comme une chape de plomb sur cet air déjà bien chargé des vapeurs nocives de l’industrie.
TOUT LE MONDE EST A NIVEAU ? OKAY ON PEUT COMMENCER
En mars 2020 l’éditeur Modiphius décide de faire paraître Dishonored en version anglaise. Il faudra attendre courant février 2022 pour que le jeu paraisse aux éditions Arkhane Asylum en Français. Pour le moment, sont disponibles en français uniquement le livre de base et le PDF. Dans sa version anglaise il existe un kit du maître du jeu de 50 pages (incluant un scénario) avec des jetons pour le vide, le Chaos et l’impulsion. A voir ce que donne le planning du côté des sorties chez Arkhane Asylum et si la gamme va s’étoffer.
Il faut avoir conscience que Dishonored est un jeu de niches et j’ai quelque doute sur le fait qu’il puisse séduire ou être connu de celles et ceux qui n’ont pas déjà joué au jeu vidéo. J’espère me tromper car son univers est riche et vaste, du moins à priori.
A titre personnel je reste sceptique (comme la fosse !!!) sur l’avenir de la gamme tout comme celle de The Witcher qui ne fait que survoler le potentiel de l’univers en se limitant uniquement à ce que Geralt explore dans les livres ce qui, forcément, laisse un goût d’inachevé.
Avant d’aller plus loin, présentons le livre !
L’OBJET
Dishonored c’est 320 pages, couverture cartonnée avec un signet, le tout en couleur au format de 156 par 234 mm. Pour le prix de 39€90 qui inclus (en théorie) le PDF si vous le prenez sur le site éditeur. L’ayant acheté directement au festival du jeu je n’ai pas eu la chance d’avoir le PDF inclus et c’est bien dommage. A l’ère du numérique avec des indexes pas toujours bien fournis ou simplement pour retrouver rapidement une page, le PDF est, je trouve, un outil non négligeable.
L’ouvrage a une belle finition papier glacé, une présentation claire, un chapitrage en 12 parties majeures (14 si l’on compte la fiche de personnages et l’index). Un plus potentiel, qui pour moi est un bémol, c’est son format ; L’avantage c’est le transport, le handicap c’est la perte de place et une mise en page, certes efficace, mais avec un texte écrit en petit et surtout très peu aéré. Faites attention d’ailleurs, sur certains sites il est indiqué en format A4 et on peut se dire chouette un jeu de rôles au format A4 à 39€90, l’éditeur a fait un super effort ! (Habituellement ce genre de livre est compris entre 49€90 voire parfois 59€90) mais non, c’est un format de poche ! Pour ma part, je comprends l’argument du facilement déplaçable mais j’aime pouvoir avoir un bel ouvrage avec des illustrations en grand format.
Les illustrations sont de grande qualité (sauf peut-être pour les deux bandes dessinées qui, je trouve, desservent leurs propos et semblent étonnantes tant le reste du livre est beau).
Les chapitres
Niveau chapitres, ils sont bien faits sauf peut-être dans leurs titres (l’ajout entre parenthèse est de mon initiative). On retrouvera donc comme suit :
Dans les îles (Dishonored en bref, et qu’est-ce qu’un jeu de rôles)
Comment jouer : règles de base (système de règles, ça c’est bien fichu)
Action et intrigue (encore des règles, curieux d’avoir fait un chapitre supplémentaire)
Diriger la partie (des conseils au maître du jeu et encore des règles.)
Les protagonistes (créations de personnages)
Tiré à quatre épingles (équipement)
Dans le grand vide (magie du vide et charmes d’os)
Sur les rives du Wrenhaven (L’île de Gristol et Dunwall la capitale de l’empire)
La perle du sud (L’île de Serkonos et sa capitale Karnaca)
Par-delà ces rivages (L’île de Morley et sa capitale Wynnedown et l’île de Tyvia)
Gamins des rues et aristocrates masqués (profil de pnjs)
La route de l’huile (scénario)
Un autre aspect du livre qui est appréciable c’est qu’il est concis et bien écrit. J’ai rarement lu un livre de jeu de rôles aussi rapidement et sans avoir besoin de m’y reprendre à plusieurs fois. Le paradoxe c’est que par moment il est peut-être trop concis et finalement se contente de nous montrer ce qu’un joueur du jeu vidéo sait déjà sans aller au-delà ou très peu de ce qu’on a pu voir dans les jeux, et ça, c’est un problème à mon sens. Nous y reviendrons dans la partie qui suit : l’UNIVERS.
UNIVERS
Imaginer un monde sombre ou la vapeur est remplacée par l’huile de baleine, où un inventeur de génie a trouvé un moyen de créer de l’électricité et des automates autonomes au service de nobles décadents et corrompus maltraitent la population ouvrière. Le tout sous couvert d’une religion violente brûlant tout ce qu’elle ne comprend pas y compris les anciennes croyances liées au grand vide avec pour toile de fond un peuple laissé à l’abandon dans une terrible épidémie qui tue ou transforme en cannibales les survivants contaminés. Alors vous aurez une idée de l’atmosphère terrible dans laquelle vous allez pouvoir faire évoluer votre alter ego. Celui-ci sera amené à déjouer des complots, rétablir la justice ou simplement survivre ; seul ou en rejoignant l’une des nombreuses factions présentées dans le livre, que ce soit dans l’administration impériale ou dans un groupe de pirates ou encore dans un syndicat d’ouvriers. Les situations de jeu seront vastes et le jeu lui-même encouragera l’aspect narratif.
Sur le papier tout ceci est beau mais :
L’univers n’est pas assez développé à mon sens. Le maître du jeu n’a pas assez de matière et on sait bien peu de choses sur les événements. Il y a bien une ligne du temps dans le chapitre « sur les rives du Wrenhaven » mais celle-ci ne couvre que quelques événements des jeux vidéos ce qui pose des problèmes pour composer des histoires originales sans risquer de rentrer en conflit avec l’histoire qui pourrait être étoffée dans des développements éventuels de la gamme. On notera néanmoins l’effort des écrivains d’avoir proposé des idées d’intrigues lors des développements des lieux et des factions présentés dans l’ouvrage (ainsi que des personnages non joueurs pour pouvoir les ajouter comme contact à votre personnage). J’ai le sentiment étrange que si le jeu vidéo nous offrait une vue depuis une fenêtre, laissant présager un univers riche et vaste, le jeu de rôles, lui, se contente de broyer tous les aspects du jeu pour les présenter sans jamais aller au-delà. Impossible par exemple d’avoir une carte du monde, ou des dates sur quand et comment s’est constitué l’empire. Il n’y a pas de portraits ou d’emblèmes de familles pour chaque île. Vous ne trouverez pas non plus d’éléments historiques sur le pourquoi c’est un empire, pourquoi cette famille, comment se passe le quotidien d’un habitant, quel véhicule circule dans les rues etc.
Le côté aseptisé de l’ouvrage qui en permet une lecture fluide et agréable me donne un sentiment de vertige étonnant. J’ai aussi l’impression tout comme ça a été le cas pour le jeu de rôles The Witcher qu’il y a, soit la peur de prendre un risque côté auteur, soit le fait d’avoir été limité dans ce qui pouvait être dit ou écrit pour ne pas avoir un objet « officiel » en contradiction avec la sortie d’un jeu futur.
Ceci étant j’avais déjà trouvé que Dishonored (2) faisait un drôle de choix lors de son dernier DLC : la mort de l’outsider qui d’ailleurs, rien que dans son titre, est… dommage. Sans vous spoiler je trouve que c’est un titre peu inspiré et que si le titre correspond au contenu ça n’a que peu d’intérêt de détruire sa trame en l’évoquant.
De fait, l’univers transcrit dans le jeu de rôles m’apparaît comme brisant la poésie du jeu vidéo. A vouloir expliquer certaines choses qui doivent rester mystérieuses et d’autre concrètes qui ne sont pas développées on brise l’immersion ! Par exemple vous pouvez jouer un membre de l’abbaye du Quidam (faction) sans avoir accès aux 7 canons qui sont le dogme de base de l’abbaye ! Ces canons sont écrits dans le jeu vidéo mais pas dans le livre de jeu de rôles qui présente la faction jouable. On nous donne par exemple les statistiques d’un « dieu » : l’outsider. On peut se demander l’intérêt d’une telle démarche. D’autant plus que les statistiques sont au maximum humain ce qui le rend d’autant plus faible pour un “dieu” c’est donc à mon sens un paradoxe.
Si vous prenez le temps de parcourir internet à la recherche d’informations sur Dishonored vous en aurez plus que dans le livre officiel du jeu de rôles et à mon sens c’est anormal… Vous aurez mêmes des informations plus précises sur les dates et les personnages clefs importants de chacune des iles.
Ce problème de concision arrive aussi dans les mécaniques de jeu même si ici c’est pardonnable dans la mesure ou le jeu se veut narratif et on peut lui reconnaître le fait qu’il l’est : Les mécaniques sont simples et rapides. Peut-être trop simples ?
Je termine sur l’univers avec un dernier point. J’ignore pourquoi, c’est peut-être en lien avec sa présentation épurée, mais je trouve que l’atmosphère du jeu ne transparait pas dans l’ouvrage et qu’il va être difficile de rendre son ambiance bien particulière en narration sans les images et visuels des artistes Cédric Peyravenay et Sergey Kolesov (les artistes ayant “dirigés” l’aspect visuel des jeux vidéos) qui apportent une vision bien précise de celui-ci. Sans ce support le jeu semble perdre corps. J’espère qu’un écran du maître de jeu arrivera rapidement pour donner un point d’ancrage visuel aux personnes qui ne connaissent pas l’univers du jeu.
Voyons ce qu’il en est des règles du jeu.
LES REGLES
LES BASES
Le système est simple et narratif. Il s’agit du 2d20 système initialement créé par l’éditeur Modiphius pour la troisième édition du jeu Mutant Chronicles (je n’ai jamais testé Mutant Chronicles je ne pourrais donc pas vous dire quelles sont les spécificités de Dishonored et les variations du 2D20 système s’il y en a).
Dans le cas de Dishonored voici le principe : lorsque le résultat d’une action est incertain le joueur va lancer 2d20 : l’alter-ego du joueur dispose d’un rang total pour cette action allant de 8 (faible) à 16 (expérimenté). Le joueur doit obtenir un résultat inférieur ou égal à son rang total par dé 20 pour obtenir une réussite. Chaque dé peut obtenir une réussite. Un 1 sur le dé signifie que l’action est une réussite critique et génère donc 2 réussites tandis qu’un 20 sur le dé, génère une complication. Il faut en général, 1 réussite pour réussir une action. Néanmoins ce chiffre peut varier de 1 à 5 réussites en fonction des complications voire il peut être impossible de faire l’action dans certaines circonstances.
STYLES ET COMPETENCES
Le rang du joueur pour définir si une action est réussie ou si elle échoue, est déterminé par deux statistiques : une compétence et un style. L’approche est plutôt originale même si j’aurais aimé des exemples dans le livre pour l’utilisation de certains styles qui me paraissent trop larges. Il y a 6 compétences (Analyse, Bricolage, Combat, Conversation, Déplacement et Survie) et 6 Styles (Astucieux, Audacieux, Brutal, Discret, Prudent et Vif). Chaque compétence et style ont une valeur de 4 (inexpérimenté) à 8 (expert). On ajoute donc le score de compétence au style qu’on souhaite utiliser pour réaliser une action et c’est pour ça que j’écrivais plus haut qu’on pouvait avoir un rang allant de 8 (un style à 4 + une compétence à 4) à 16 (un style à 8 + une compétence à 8).
LES SPECIALITES
Pour rendre son alter ego encore plus complet le jeu inclut un certain nombre de spécialités (archerie, acrobatie, crochetage, etc.) plutôt classiques allant de 2 à 5. Lorsque votre personnage effectuera, par exemple, une action de combat sous COMBAT + BRUTAL il jettera 2 dés à 20 faces et s’il a, admettons 3 en escrime ses dés qui obtiennent un résultat de 3 ou moins vont générer non pas 1 réussite mais 2 comme c’est le cas lorsqu’un joueur sans spécialité obtient un 1. Cela rend les personnages plus spécialisés et permet de générer plus facilement de l’impulsion qui va dynamiser la partie. Mais qu’est-ce que l’impulsion ?
L’IMPULSION
Le MOMENTUM (en vo) ou Impulsion en français est un effet obtenu par le joueur lorsqu’il réalise plus de réussite sur une action que celle nécessaire pour l’accomplir. Par exemple si le joueur obtient 3 réussites alors que l’action n’en nécessite qu’une il va obtenir 2 points d’impulsion. L’impulsion peut permettre de jeter des dés supplémentaires sur un prochain jet ou de créer une « vérité ».
LES VERITES
Les « vérités » sont des éléments qui caractérisent un personnage ou un environnement et qui ont une influence dans le jeu pouvant être traduit comme suit : Plus facile (-1 à la difficulté) plus difficile (+1 à la difficulté) impossible (ne peut être réalisée), possible (peut être finalement réalisée).
Par exemple le maître du jeu vous dit : « vous ne pouvez pas grimper ce mur il est trop lisse », votre personnage qui a 3 points d’impulsion peut en dépenser 2 (il faut 2 points pour une vérité) pour créer une vérité « ici le mur est mal entretenu et il y a une fissure ». Si le maître du jeu est d’accord l’impulsion est dépensée et l’action passe d’impossible à possible. Cependant la difficulté est peut-être de 3 ou plus ! Le joueur a intérêt à avoir des compétences solides pour tenter cette manœuvre !
L’impulsion doit être utilisée rapidement car elle représente une dynamique. A la fin de chaque scène 1 point est perdu ! En plus l’impulsion est pour tous les joueurs et il ne peut pas y avoir plus de 6 points d’impulsion dans la réserve de groupe.
Cette mécanique de jeu est intéressante elle crée une dynamique et un effet de groupe.
VIDE ET CHAOS
Le vide est une ressource à l’aspect narratif intéressant. En effet un joueur peut choisir d’échouer volontairement un jet de dés (sans jeter les dés donc) qui aura un impact sur le scénario. Donc l’action d’escalader un mur ne comptera pas mais par contre échouer à protéger un ambassadeur garant de la paix sur un jet de négociation aura un impact. Le joueur aura alors un point de vide. Ces points peuvent être utilisés de différentes manières ils peuvent servir par exemple à déclencher une rencontre surnaturelle (ou un phénomène) lors de la session en cours ou de la prochaine. Il y a d’autres utilisations intéressantes comme la relance de tous ou une partie de ses dés (1 point quel que soit le nombre de dés relancés), créer une vérité de type surnaturel ou un flashback (1 point) ou encore choisir qu’un dé soit automatiquement une réussite critique (1 point) et ils permettent aussi de compter le mana dont dispose les personnages qui ont accès aux pouvoirs de l’outsider s’ils ont été marqués par lui. Il détermine aussi le nombre de charmes d’os que peut utiliser simultanément un personnage.
Le Chaos, lui, est une ressource qui symbolise la façon dont le groupe va accentuer les effets dramatiques dans le monde. Une approche furtive, en douceur mêlée de persuasion et de compromis ne générera pas de chaos. Tandis que mettre un incendie sur un bâtiment pour créer une diversion va en générer. Un point de chaos est aussi ajouté lorsqu’un joueur subit une complication (20 sur l’un de ses dès 20) sauf si le maître du jeu préfère créer une « vérité ». Le chaos est représenté par des points. Ces points peuvent débloquer des paliers de dangerosité de façon passive en enclenchant des effets une fois la jauge de chaos remplie. Par exemple des assassinats ou des actes violents vont peut-être élever les normes de sécurité en mettant plus de gardes avec un niveau plus compétent et des points de contrôle d’identité par exemple. Ou alors des mots de passe entre les quartiers, ou encore une loi martiale avec un couvre-feu. Le Chaos peut aussi être utilisé pour permettre aux personnages non joueurs de relancer des dés ou de lancer plus de dés comme c’est le cas avec l’impulsion pour les joueurs.
Cette mécanique encourage les joueurs à être subtiles. Après, à vous de voir si vous aimez le principe de brider vos joueurs ou de mettre en place une mécanique chiffrée plutôt qu’une suite logique. Cependant l’un n’exclut pas l’autre et les points de chaos sont gardés d’une partie sur l’autre et visibles par les joueurs (sauf lors du cas d’enchères avec la confrontation de personnages non joueurs qui utilisent des points de chaos).
Les joueurs peuvent aussi générer du chaos en achetant des dés supplémentaires lorsqu’ils n’ont pas d’impulsion (ou qu’ils ne veulent pas dépenser de l’impulsion).
QU’EST-CE QU’ON PEUT JOUER ?
Dans le monde de Dishonored vous avez un système de 13 archétypes qui ne sont pas limitatifs, mais qui vont orienter vos personnages. Chaque « classe » va donner des points de compétence et de style avec toujours la possibilité de moduler certains éléments. Enfin chacun de ces rôles est accompagné de Talents exclusifs qui permettent d’avoir des effets intéressants. Par exemple l’assassin pourra choisir un talent qui va générer 1 point de chaos de moins lorsqu’il tuera une cible. Votre personnage aura également une vérité personnelle qui caractérise ses actes et pourra choisir, si le maître du jeu l’autorise, un tempérament qui lui donnera des talents spécifiques. Les talents d’archétype peuvent être achetés avec de l’expérience donc votre personnage peut être polyvalent. Néanmoins le choix de l’archétype n’est pas anodin car si vous voulez apprendre des talents d’un autre archétype ceux-ci seront 50% plus cher en coût d’expérience.
Pour vous donner une idée des rôles que vous pouvez incarner voici la liste des archétypes jouables :
Assassin, Chasseur, Commandant, Coursier, Duelliste, Eclaireur, Entrepreneur, Erudit, Explorateur, Guide, Inventeur, Tireur d’élite et Vaurien.
Les archétypes vont aussi vous donner des spécialités automatique (par exemple furtivité, lutte, médecine, négociation, etc.) et des points de répartition libre. Encore une fois vous ne pourrez pas la suite acheter n’importe quelle spécialité (sans surcoût cette fois ci) mais votre personnage sera bien plus efficace dans le champ d’expertise de son archétype, il parait donc important de bien choisir celui-ci.
La création de personnages est fluide, agréable et courte. Par contre sans la prise optionnelle du tempérament, les personnages restent un peu génériques et similaires. A vous de voir si vous utilisez cette règle qui augmente quand même bien les capacités de votre personnage (+2 compétences à 1 et 2 styles à +2 et 1 style à +1 avec un talent supplémentaire) et permet une customisation plus avancée.
Votre personnage aura aussi des contacts, de l’équipement et pourra faire partie d’une faction.
Maintenant que votre alter ego est prêt voyons ce que le jeu propose comme histoires.
SCENARIO
Le livre présente tout un tas d’accroches sous forme de rumeurs liées à chaque faction et chaque quartier des différentes villes et îles présentées. Néanmoins ces accroches demanderont beaucoup de travail pour être transformées en scénario. Elles ont le mérite d’exister.
Pour ce qui est du premier scénario le cadre temporel est curieux car il sort de la chronologie du livre et se présente donc plutôt comme une histoire isolée où les joueurs ne pourront peut-être pas continuer à incarner leur alter ego après la fin du scénario.
Celui-ci se présente comme une mini campagne de plusieurs chapitres. Encore une fois il est à la fois trop vague pour être joué comme tel et parfois trop dirigiste pour permettre au joueur une liberté de mouvement. Il faudra que le maître du jeu prenne le temps de le développer pour pouvoir le faire jouer.
L’introduction est bien fichue et permet tout de suite de donner un but commun au groupe de joueurs sans risquer qu’ils se dispersent (au moins pour la première partie).
J’attends néanmoins de voir comment va évoluer la gamme et je n’ai pas encore mis la main sur le scénario du kit du maître du jeu qui, pour le moment, n’existe qu’en version originale.
CONCLUSION
J’avais une idée plutôt positive du jeu mais lors de la rédaction de cet article je me suis surpris à être sévère et ce, malgré la qualité évidente de l’écriture et l’envie de bien faire des auteurs. Encore une fois mon avis est subjectif, je ne peux m’empêcher de penser que les auteurs ont une ligne directrice à suivre sans avoir le droit de s’en écarter avec un nombre de pages limité. Je n’ai pas l’impression de remplissage inutile, je trouve au contraire que le livre manque d’informations. Je trouve ça dommage, je m’attendais à en apprendre plus sur le monde de Dishonored à la lecture de l’ouvrage et finalement j’ai l’impression d’avoir entre les mains le strict minimum pour jouer des scénettes sans grande envergure dans cet univers.
En fait, si je devais reprocher une chose au jeu c’est de n’être que les prémices, une promesse inachevée, qui survolent un univers riche par peur de fixer les choses et qui pourtant par moment fait l’erreur de mettre des mots sur des choses qui devraient rester poétiques.
J’attends de voir comment va évoluer la gamme et je vous ferais un retour à ce moment-là. Pour le moment je ne me suis pas engagé sur de grand scénario par crainte de me retrouver bloqué. Le jeu est pour ainsi dire en pause et je trouve ça dommage.
Enfin, même si les règles se veulent narrative elles sont parfois trop imprécises et nécessitent un parti pris pas toujours équitable pour trancher telle ou telle action. L’usage de certains styles pouvant être facilement justifié par des joueurs ayant un bon argumentaire. Certains styles semblent donc laissés complétement de côté. On notera également l’absence de règles de soin puisque la jauge de stress (les points de vie) se récupère au début de chaque scène. Et même si une vérité « jambe cassée » peut entraver le personnage, il est indiqué que la dépense de 2 points d’impulsion peut mettre fin à une vérité. Est-ce que cela veut dire que « jambe cassée » peut être résolu en une action de soin par la dépense de 2 points d’impulsion ?
Il y a donc de grandes zones de flou c’est dommage.
Je ne peux m’empêcher d’espérer le meilleur pour la progression de la gamme mais je reste vigilant sur son développement et je ne peux pas vous le conseiller en l’état ou alors uniquement pour des scenarii courts ou si vous ne craignez pas de développer votre propre monde de Dishonored avec comme maigre base le livre ici présent.
Si vous l’avez testé vous aussi, n’hésitez pas à me partager votre expérience je suis curieux de lire vos retours.